Le diabète de type 1 : un facteur de risque des troubles des conduites alimentaires.
Trop longtemps tabous, encore trop peu pris en charge, les troubles des conduites alimentaires sont intimement liés au diabète de type 1. Architecte de formation, artiste et patiente partenaire, Juliette de Salle partage son témoignage et urge les médecins et les thérapeutes à travailler plus ensemble.
Tomber dans l’engrenage.
J’avais 16 ans quand le diabète s’est invité chez moi. Découvert suite à une grande fatigue et une importante perte de poids, je l’ai accueilli, dans un premier temps, avec résignation. Comme une bonne élève, j’appliquais à la lettre le traitement que le médecin m’avait prescrit. Aussitôt je repris les kilos perdus, suivis de quelques autres en prime. Cela marqua le point de départ d’une angoisse qui me collera durablement.
Je ne me reconnaissais plus et manquais de repères. Les changements brutaux de mon corps développèrent des pensées obsédantes autour de mon image.
J’entrepris alors de me contrôler davantage pour retrouver mon corps d’adolescente. Le calcul des calories s’est substitué au calcul “imposé” des glucides. Une seule chose comptait : perdre du poids ! Je m’imposais un régime drastique et une activité sportive intense.
Cela fonctionna un temps mais la privation de tous ces aliments gras et sucrés que je m’interdisais, couplée à un sentiment intense de vacuité, ont enclenché des crises de boulimie. Si celles-ci me réconfortaient un instant, en calmant mon mal-être et mes angoisses, en me protégeant de la moindre de mes émotions, sans tarder, la culpabilité et la honte balayaient ces sensations. J’étais entraînée dans une spirale infernale alternant restrictions et excès.
Mes glycémies faisaient du yoyo. J’essayais tant bien que mal de rattraper mes écarts en me piquant mais cette “correction” engendrait bien souvent une hypoglycémie qui elle-même donnait lieu à une nouvelle crise de boulimie. Tant qu’à être obligée de me resucrer, autant en profiter pour manger ce qui me plaisait. Je perdais tout contrôle, je me sentais nulle, lâche, insignifiante et je prenais du poids. Mes moyens de compensation (vomissements, surdosage d’hormones thyroïdiennes, laxatifs, sport) n’étaient pas assez efficaces et c’est ainsi que j’ai commencé volontairement à omettre de prendre de l’insuline. A la place de “sauter un repas”, je “sautais une injection”. Je maintenais une dose minimale d’insuline pour ne pas tomber en acidocétose, ayant bien conscience de jouer avec le feu. Je paierai d’ailleurs les frais de ce “jeu diabolique” d’une rétinopathie quelques années plus tard.
En attendant, je vivais dans une dévalorisation permanente, déchirée entre la recherche d’un idéal illusoire et un comportement abject.
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