Patient et soignant : les deux faces d'une même pièce.
Alex Durussel-Baker illustre la première couverture de Glucose toujours et nous propose sa vision de la relation soignant/soigné.
Comme une couverture de magazine, la couverture de Glucose toujours capture l’idée du moment dans l’univers du diabète. Pour son lancement, Glucose toujours a invité Alex Durussel-Baker de Diabetes by Design. Avec sa création “Two Sides”, Alex nous propose sa vision de la relation soignant/soigné. C’est avec la métaphore du puzzle que nous inaugurons le média pour illustrer notre volonté d’humaniser toujours plus la relation avec le corps médical et notre mission de réconcilier les morceaux d’information dans un espace dédié. Un puzzle de 1000 pièces prend du temps et peut vite être ennuyeux, mais bien s’informer n’a pas besoin de l’être.
Glucose toujours : Peux-tu te présenter à nos lecteurs ?
Alex Durussel-Baker : Je m'appelle Alex, j'ai 34 ans, je suis directrice d'une agence de design et de stratégie et pendant mon temps libre j'illustre les hauts et les bas de la vie quotidienne avec un diabète de type 1. J'habite en Écosse à Édimbourg avec mon mari et mon chien Bacchus.
Combien de temps après ton diagnostic as-tu lancé Diabetes by Design ?
J’ai créé Diabetes by Design à peu près un an après mon diagnostic. Je croyais que je gérais bien mon diabète car mes résultats étaient très bons mais en fait, petit à petit, je devenais obsédée par l’envie de tout contrôler. Heureusement, les médecins s’en sont aperçus. J’ai commencé à voir un psychologue qui m’a permis de réaliser que cette obsession n’était pas saine et surtout qu’elle n’était pas viable sur le long terme. En fait, je m’acharnais à contrôler chaque aspect de ma vie pour éviter de faire face à mon diabète et aux malentendus sur la condition qui existent dans la société. Finalement, j’étais très isolée. Puis j’ai compris que si je voulais m’en sortir, je devais trouver un moyen de créer des ponts entre moi, mon diabète et les autres. C’est à partir de là que j’ai choisi le graphisme et l’humour.
Quel est le concept de ce projet ?
L'objectif de Diabetes by design est de transformer une maladie invisible et souvent incomprise en un sujet de discussion visuel et attrayant. Un moyen pour les personnes diagnostiquées, leurs amis et leur famille de faire tomber les barrières et de créer des liens. Au-delà de l'œuvre d'art, Diabetes by design est une boîte à outils appelée cartes d'accompagnement (companion cards). Cette boîte à outils se compose de 62 cartes regroupées en six séries qui explorent les multiples facettes de la vie avec le diabète de type 1. Elles servent d'introduction amicale et médicalement précise pour une personne récemment diagnostiquée, de rafraîchissement pour les plus expérimentés et d'invitation à toute personne désireuse de s'informer sur cette maladie chronique.
Peux-tu nous présenter une de tes créations préférées ?
« One of us » est inspirée de l’énergie positive de Keith Haring pour évoquer le sentiment que je ressens quand je vois d'autres personnes vivant avec le diabète dans la rue. On se reconnaît aujourd’hui grâce aux capteurs de glycémie posés sur les bras. On se sent tout de suite moins seul et c’est un petit clin d’œil à la communauté secrète à laquelle nous faisons partie.
Tu inaugures Glucose toujours en illustrant la première couverture du site internet avec "Two Sides". Quelles ont été tes inspirations ? Comment décrirais-tu la relation idéale entre un patient et un soignant dans la prise en charge du diabète ?
Aujourd’hui, j’ai une relation saine avec mon diabète. On a toujours nos hauts et nos bas mais on a trouvé un terrain d’entente. Pour moi, créer une relation positive avec le corps médical a été fondamental pour trouver cet équilibre. Avant de vivre avec une maladie chronique et de comprendre à quel point chaque diabète est unique, j’acceptais cette hiérarchie établie il y a des centaines d'années entre le médecin et le patient. Le médecin nous donne une marche à suivre pour nous soigner et nous, patients, devons “simplement” la suivre. Avec un diabète, c’est différent. On ne va pas guérir, on va seulement apprendre à mieux gérer la maladie afin de réduire les risques de complications. En plus, c’est différent pour tout le monde donc il n’y a pas de marche à suivre préétablie. Une relation saine est une relation équilibrée où le patient et le docteur travaillent ensemble en s’écoutant, se respectant, de manière exploratoire et expérimentale afin de trouver un traitement qui correspond au mieux au patient. Si le médecin ou le patient est trop rigide, ça ne marche pas. Il faut trouver ce yin et yang.
Quelles sont tes sources d'information sur le diabète et que recherches-tu comme type d'information ?
Les sites des organisations Diabetes UK (l’association anglaise dédiée au diabète) et JDRF (Fondation de la recherche sur le diabète juvénile) vulgarisent les avancements en matière de recherche mais je trouve aussi beaucoup d’information et de soutien sur les réseaux sociaux comme Instagram. J’écoute aussi beaucoup de podcasts pour me sentir moins seule. Entendre des voix différentes m’inspire et me donne du courage. Néanmoins, j’ai remarqué que si une source d’information donne des conseils trop précis (combien d’insuline prendre pour tel ou tel repas par exemple), je décroche car je trouve cela dangereux.
Une relation saine est une relation équilibrée où le patient et le docteur travaillent ensemble en s’écoutant, se respectant, de manière exploratoire et expérimentale afin de trouver un traitement qui correspond au mieux au patient.
Qu'attends-tu d'un média sur le diabète ?
On a besoin de plus de sensibilisation sur le diabète de type 1 et surtout sur la santé mentale et le poids psychologique de gérer une maladie invisible comme le diabète. C’est aussi important de présenter beaucoup d'exemples de personnes qui vivent très bien avec leur diabète et qui sont épanouies.
Retrouvez le travail d'Alex Durussel-Baker sur son site internet et sur Instagram.
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